Pour la deuxième année consécutive, les laboratoires d'idées belge, Carbon Market Watch, et allemand, New Climate Institute, ont évalué la pertinence (ou « l'intégrité ») des engagements pris par les plus grandes multinationales pour respecter les objectifs de l'Accord de Paris. L'édition 2023 de son « Corporate Climate Responsibility Monitor (1) », parue le 13 février, se focalise sur vingt-quatre sociétés leaders des secteurs de l'automobile, de l'électronique, du transport ou encore de la grande distribution. À elles seules, elles ont généré 3 160 milliards de dollars de recettes en 2021 et émis environ 2,2 gigatonnes d'équivalent dioxyde de carbone (GtCO2e/an) en 2019, soit 4 % des émissions totales de la planète.
Carrefour, le mauvais élève français ?
Ce niveau « d'intégrité » n'est, d'après les deux think-tanks, pas respecté par les plans d'action des 23 autres multinationales. Le premier groupe français de la liste, Stellantis, marque par exemple des points pour ses objectifs identifiables et quantifiables (neutralité carbone en 2038, avec réduction d'au moins 85 % de ses émissions pour l'électrification de ses véhicules mis sur le marché, et uniquement 10 % de compensation carbone), mais en perd dans sa volonté de continuer à vendre des véhicules thermiques en Inde ou au Brésil. Quant à Carrefour, second groupe français examiné qui vise le « net zéro » en 2040, il reste dans le bas du classement pour la « divulgation incohérente » du détail de son empreinte carbone (ne publiant des données ne couvrant que 20 % de ses magasins, selon le rapport) et son absence de plans de compensation carbone. Des trous dans la raquette déjà repérés et dénoncés l'an dernier.
Une trop forte dépendance à la compensation carbone
D'autant qu'au moins trois quarts de ces géants (en particulier des membres des Gafam, comme Google, Apple et Microsoft) misent majoritairement sur des actions de compensation carbone par de la reforestation plutôt que sur une réduction directe de leurs émissions. « C'est problématique pour deux raisons majeures : le caractère éphémère du stockage biogénique du carbone de ces projets ne convient pas pour compenser durablement des émissions de gaz à effet de serre ; et le nombre de crédits carbone que demandent de tels plans, si chaque groupe en faisait autant, réclamerait une quantité de ressources naturelles de deux à quatre planètes Terre », soulignent les deux laboratoires d'idées.